Réduire les émissions liées à la déforestation au Cameroun exige des expertises variées: étude

Alors que le monde tente difficilement d'appliquer un programme de l'ONU visant à ralentir les perte et dégradation de la forêt (REDD+), une nouvelle étude venue du Cameroun montre que la complexité de ce programme exige l'expertise d'acteurs variés, au sein et en dehors du gouvernement.
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While Cameroon has started to make positive changes to forest management policies,  leadership and coordination of state institutions is lacking. Ollivier Girard/CIFOR.

Le Cameroun a commencé à faire des changements positifs en matière de gestion forestière mais les institutions doivent encore prouver leur capacité à créer une direction et une coordination adaptées. Ollivier Girard/CIFOR.

Alors que le monde tente difficilement d’appliquer un programme de l’ONU visant à ralentir les pertes et dégradations de la forêt (REDD+), une nouvelle étude venue du Cameroun montre que la complexité de ce programme exige l’expertise d’acteurs variés, au sein et en dehors du gouvernement.

“La REDD+ couvrant des champs variés, on ne peut plus attendre du ministère de l’Environnement qu’il mène le programme seul”, selon Denis Sonwa, scientifique du CIFOR et co-auteur de REDD+ policy strategy in Cameroon: Actors, institutions and governance*.

“Il est primordial que l’état se réinvente, comme une organisation qui a des choses à apprendre, et qu’il tire profit de l’expertise offerte par d’autres acteurs du réseau mondial afin de pouvoir assurer un rôle de directeur et de coordinateur dans la conception d’une stratégie nationale REDD+”.

Bien que le niveau de déforestation dans ce pays – qui possède la deuxième plus grande forêt tropicale mondiale – demeure relativement faible, comparé à des régions similaires d’Asie et d’Amérique latine, une étude récente révèle que le taux de croissance annuel de déforestation dans le Bassin du Congo a doublé depuis 1990. La région est donc devenue une cible prioritaire de l’aide internationale, afin de ralentir le taux de perte de forêt.

Ce sujet sera l’un des thèmes discutés lors de la conférence de deux jours La gestion durable des forêts d’Afrique centrale: hier, aujourd’hui et demain à Yaoundé au Cameroun les 22 et 23 mai 2013. .

Retrouvez les reportages du CIFOR sur les forêts d’Afrique Centrale sur forestsnews.cifor.org/fr/yaounde

Le programme mondial REDD+ – qui participe à l’effort d’atténuation des effets du changement climatique – vise à rémunérer les pays en développement très boisés afin qu’ils conservent leurs arbres débout. Cela parce que, avec leur teneur en carbone, ils émettent plus de gaz à effet de serre dans l’atmosphère quand ils sont coupés ou brûlés que l’ensemble des avions, voitures, camions et ferries.

Des milliards de dollars sont déjà engagés pour contribuer à cette initiative, mais les pays riches en forêt ont du mal à proposer des politiques crédibles et des structures pour organiser les programmes REDD+.

Alors que le Cameroun a commencé à faire des changements positifs en matière de gestion forestière, les institutions étatiques doivent encore prouver leur capacité à créer une direction et une coordination adaptées pour mettre en place une stratégie REDD+ nationale.

L’étude promeut l’idée de “gouvernance au-delà du gouvernement”.

“Au Cameroun, des organisations variées ont des compréhensions et des approches très diverses de la gestion forestière et de la justice sociale. Par exemple, la recherche montre que quelques ONG locales ont une meilleure expertise des conséquences sociales de la politique forestière”, explique Olufunso Somorin, scientifique du CIFOR et co-auteur de l’article.

Construire à partir des institutions existantes

Le Cameroun a l’avantage de bénéficier de forums impliquant de multiples acteurs dotés d’une large expérience de la gestion forestière, ce qui pourrait contribuer à une mise en place réussie de REDD+, remarque l’auteur.

Par exemple, les “groupes de consultation*” établis depuis longtemps entre les ministères du gouvernement et les donneurs et organisations internationaux, ont permis de lutter contre des défis du développement durable, comme participer au Plan d’Action de l’Union européenne FLEGT (Forest Law Enforcement, Governance and Trade*), qui vise à assurer que le bois exporté provient de sources vérifiables et légales. La société civile soutien également depuis longtemps les revendications des communautés locales qui veulent gérer leurs propres forêts et partager les revenus tirés des taxes forestières.

La question essentielle, d’après l’étude, est de savoir comment le pays peut construire à partir de ces dispositions institutionnelles.

Les intervenants locaux ont commencé à répondre à cette question.

Une plateforme informelle se développe pour poser les bases d’une politique REDD+. Il faut espérer que cela encouragera la participation, encore insuffisante des communautés locales* dans la conception et la mise en oeuvre de projet REDD+.

Mais de nombreux défis demeurent.

Le rôle du gouvernement est un problème majeur. Les relations entre le ministère de l’Environnement et Protection de la Nature (qui, dans les faits, supervise le processus REDD+ du pays), et le ministère des Forêts et de la Faune (principal gardien des forêts nationales) mettent en péril les progrès du programme, selon Sonwa.

“Leur interaction est troublée par des problèmes de direction pour gérer la coordination globale de la stratégie nationale REDD+”, dit-il.

Les ministres de l’Agriculture et de la Planification ainsi que l’industrie agricole et les entreprises de bois doivent, eux aussi, s’impliquer davantage.

“Il s’agit de freiner la déforestation et de vendre ces progrès à la communauté internationale, et pourtant ils ont du mal à définir leurs rôles”, explique Sonwa.

Mais il pressent que les investisseurs privés trouveront leur place quand il s’agira de décider à qui appartiennent les crédits d’émissions.

“Il faut avoir une vision et une compréhension claires des opportunités et des contraintes de REDD+ concernant le développement durable, l’amélioration de la gestion forestière et les rôles que le secteur privé et la société civile peuvent jouer”.

Des efforts fructueux pour combler ces lacunes pourraient largement bénéficier au Cameroun, selon Sanwa.

“Et, en tant que mécanisme exécutoire, REDD+ peut aider à promouvoir les efforts encore insuffisants pour lutter contre la déforestation au Cameroun”.

* Liens non traduits en français

Pour plus d’informations sur les questions discutées dans cet article, veuillez contacter Denis Sonwa sur d.sonwa@cgiar.org

Ce travail s’inscrit dans le cadre Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie*, aidé par le Centre de recherches pour le développement international (CRDI-IDRC), la Banque africaine de développement, le Department for International Development (DFID) et la Communauté économique des états de l’Afrique Centrale (CEEAC-ECCAS).

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