Les délégués de Bonn s’attaquent à l’impasse des négociations REDD+ sur le changement climatique

Les négociateurs qui vont participer à une conférence de l'ONU sur le changement climatique la semaine prochaine devront proposer la mise en place d'un organe directeur pour la REDD+, qui pourrait aider à fournir une solution pour la manière dont les pays surveillent, notifient et vérifient leurs réductions réussies des émissions.
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Delegates at the U.N. meeting in Bonn will debate whether a REDD+ governing body tasked with organizing the flow of financial support and establishing the verification processes will help the emissions reduction scheme out of its current impasse. Adopt A Negotiator

Les délégués lors de la réunion de l’ONU à Bonn débattront si un organe de gouvernance pour la REDD + aiderait le programme de réduction des émissions à sortir de son impasse actuelle. Adopt A Negotiator

BONN, Allemagne (31 Mai 2013) – Les négociateurs qui vont participer à une conférence de l’ONU sur le changement climatique la semaine prochaine devront proposer la mise en place d’un organe directeur pour la REDD+, qui pourrait aider à fournir une solution pour la manière dont les pays surveillent, notifient et vérifient leurs réductions réussies des émissions.

L’organe serait également en charge de déterminer la façon dont l’aide financière serait versée.

La REDD + est un mécanisme qui transfert de l’argent aux pays en voie de développement afin d’encourager l’adoption de politiques et de pratiques réduisant les émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts. Mais les progrès ont stagnés décembre dernier à Doha en raison d’un échec de la part des pays à se mettre d’accord sur la façon dont la REDD+ surveillerait et vérifierait les réussites, qui est liée à la façon dont les pays seraient indemnisés pour leurs exploits.

La déforestation et la dégradation des forêts – en grande partie dues à l’expansion agricole, la conversion des forêts en pâturages, au développement des infrastructures et aux feux – comptent pour 10 à 15% du total des émissions mondiales de gaz à effet de serre, plus que l’ensemble du secteur mondial des transports et dépasser seulement par le secteur de l’énergie.

Les délégués lors de la réunion à Bonn, en Allemagne, qui aura lieu du 3 au 14 juin, débattront pour savoir si un organe directeur de la REDD+, chargé d’organiser les flux d’aide financière et la mise en place des processus de vérification, aiderait le programme de réduction des émissions de sortir de son impasse actuelle.

« Nous aurions dû savoir depuis Doha (où s’est déroulé le précédent sommet sur le changement climatique), comment les réductions d’émissions doivent être notifiées et vérifiées », a déclaré Louis Verchot, directeur du Centre pour la Recherche Forestière Internationale (CIFOR).

« Nous ne le savons pas parce que nous n’avons pas encore réglé la question de savoir qui fait la vérification. Par conséquent, il n’y a pas non plus d’accord sur la façon dont l’argent doit circuler. »

Faire fonctionner les processus de suivi, de notification et de vérification

Créer un organe de REDD+, une entité opérationnelle dotée de pouvoirs réels plutôt qu’un simple rôle consultatif, pourrait aider à surmonter le blocage actuel entre les pays en voie de développement et les pays développés à accepter la façon dont le mécanisme REDD+ doit évoluer, selon M. Verchot.

« Cet organisme peut fonctionner de deux manières », a-t-il dit. « La première est un rôle consultatif dans lequel l’organisme facilite et conseille sur la façon dont l’argent doit circuler à travers des différents flux financiers, tels que ceux actuellement coordonné par le Fonds de Partenariat pour le Carbone Forestier de la Banque mondiale et de l’ONU REDD. »

REDD+ est le seul programme que les pays en voie de développement ont soutenu en déclarant: « C’est une action à laquelle nous aimerions contribuer ». Si nous ne pouvons pas prendre cette contribution des pays en voie de développement et la rendre fonctionnelle, c’est un triste constat.

Le Fonds de Partenariat pour le Carbone Forestier soutient les pays en voie de développement dans leurs efforts pour la REDD+.

L’organe pourrait donner des conseils sur les besoins en capacités techniques et des recommandations relatives aux activités de financement pouvant surmonter les contraintes techniques », a expliqué M. Verchot.

« La deuxième manière – qui fait de l’organe directeur une entité opérationnelle – lui donnerait plus de pouvoir », a-t-il ajouté.

« L’organe établirait des normes de validation, aurait une capacité juridique, accepterait et débourserait de l’argent – et si on peut y ajouter la vérification, on pourrait sortir de l’impasse entre les pays en voie de développement et les pays développés. »

Lors de la 18ème Conférence des Parties (COP18) à Doha en 2012, les négociations avaient échoué sur la manière de vérifier les émissions de carbone et sur la façon dont les processus de vérification devraient être financés. Plus précisément, l’impasse – déclarée comme telle entre le Brésil (un bénéficiaire potentiel de la REDD+) et la Norvège (le plus grand bailleur de fonds de conservation de la forêt tropicale) – concernait les normes selon lesquelles les émissions liées à la déforestation seraient vérifiées.

La Norvège a fait pression pour un processus de vérification indépendant et international, mené par des experts, mais le Brésil et d’autres pays en voie de développement ont dit qu’ils n’étaient pas prêts à s’engager pour des exigences de vérification externe.

« Une entité multilatérale représente un moyen pour les pays en voie de développement d’avoir les mains sur le volant d’égal à égal avec les pays développés », a dit M. Verchot.

« Cela leur donnerait un certain contrôle sur le processus et sur la façon dont il est appliqué. A ce niveau, le processus devient un terrain d’entente – ce ne sont pas les pays développés qui envoient leur équipes d’experts, c’est une initiative conjointe de vérification. »

Faire circuler les flux d’argent

Une fois que les mécanismes de suivi, de notification et de vérification des réductions véritables des émissions ont été convenus, il incombe aux pays développés de « verser l’argent et de faire circuler les finances, que ce soit à travers de la mobilisation de fonds issus du secteur privé ou de l’argent public qui est véritablement complémentaire et qui n’a pas déjà été consacré à l’Aide Publique au Développement (APD) », a expliqué Mr Verchot.

Afin de lancer des projets environnementaux tels que ceux mis en œuvre sous la REDD+, le Fonds Vert pour le Climat (FVC) – un mécanisme de financement de la CCNUCC qui transfère de l’argent des pays développés vers ceux en voie de développement, a créé Fast Start Funding, qui était censé avoir déboursé 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012.

Cependant, seul plus d’un tiers de cette somme aurait été recueillie par des pays développés, et les commentateurs se demandent dans quelle mesure ce fonds représente des ressources nouvelles et additionnelles, qui sont distinctes de l’APD.

Ceci soulève des doutes quant à la question de savoir si le FVC serait en mesure de respecter son objectif de 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 pour des projets environnementaux, selon Mr Verchot.

« La raison pour laquelle nous n’avons pas été à la hauteur dans la mobilisation de l’argent, c’est que nous avons été incapables d’obtenir des engagements à long terme de réduction des émissions des pays développés », a-t-il dit.

« Nous avons eu une période de cinq ans (en vertu du Protocole de Kyoto) qui a pris fin en 2012 et nous sommes maintenant dans la deuxième période, mais avec aucun engagement réel et aucune décision sur ce que les engagements devraient être. »

En 2011, le Canada est devenu le premier pays à se retirer de ses engagements et promesses du Protocole de Kyoto. Le pays a déclaré qu’il ne voulait pas « consacrer des fonds limités pour capitaliser le nouveau Fonds Vert pour le Climat… jusqu’à ce que tous les principaux émetteurs acceptent des objectifs de réduction juridiquement contraignants et une comptabilité transparente des stocks de gaz à effet de serre ».

Pendant ce temps, les États-Unis et la Chine – les plus grands émetteurs de la planète – n’ont pas pris d’engagements juridiquement contraignants pour réduire leurs émissions.

« Il est difficile d’amener les pays qui polluent moins à prendre des engagements alors que les grands pollueurs ne sont pas disposés à prendre des mesures », a déclaré M. Verchot. « Tant que l’utilisation de combustibles fossiles n’est pas pénalisée, au moins assez pour que la vitesse aille vers une réduction des émissions connexes, nous allons encore voir une réticence à mettre de l’argent sur la table. »

Au cœur de la réticence à s’engager davantage pour lutter contre le changement climatique à travers de la REDD+ sont des perceptions émotionnelles et contradictoires profondes de qui est responsable de la création des émissions historiques et actuelles, et donc qui devrait être responsable pour assumer la charge de rectifier les erreurs du passé et du présent.

« C’est le nœud du conflit entre les Etats-Unis et la Chine », a dit Mr Verchot.

Les pays en voie de développement tels que la Chine ne se considèrent pas comme ayant causé le changement climatique, alors que les pays tels que les Etats-Unis veulent voir les gros émetteurs actuels, tels que la Chine, s’engager à des accords contraignants avant qu’ils ne fassent de même.

Mr Verchot note que la REDD+ représente une pointe d’espoir au milieu du conflit sur qui doit assumer la responsabilité.

« La REDD+ est le seul projet que les pays en voie de développement, qui n’ont pas vraiment d’obligation de réduction des émissions, ont soutenu en disant : ‘C’est une action à laquelle nous aimerions contribuer’ »

« Si nous ne pouvons pas prendre cette contribution des pays en voie de développement et la rendre fonctionnelle, c’est un triste constat. C’est comme dire : ‘Merci, mais non merci, nous allons vous faire respecter des normes que nous ne respectons même pas nous même’. »

ENJEUX PRINCIPAUX À SURVEILLER

• Mesure, notification et vérification (MRV)

La capacité à mesurer la performance est un pré-requis pour la mise en œuvre d’un mécanisme axé sur des résultats, et dans le contexte de la REDD +, la mesure avec précision des réductions d’émissions fait partie de ce défi. Les négociateurs devront s’entendre sur la façon dont les pays montrent que des réductions réelles d’émissions ont été atteintes. Cela implique une prise de décision sur la façon dont l’évolution des stocks et / ou des flux de carbone forestier est surveillée, comment ces changements sont ensuite signalés et enfin comment la vérification des rapports peut être faite. La recherche du CIFOR sur une approche par étapes fournit des indications sur la façon dont les pays ayant peu de données peuvent commencer à développer des niveaux de référence et des niveaux d’émissions de référence, le plus souvent utilisés comme une base de référence ‘business-as-usual’, pour évaluer la performance d’un pays dans sa mise en œuvre de la REDD +.

Financer les actions basées sur les résultats

Les négociateurs doivent décider quels mécanismes doivent être mis en place ou renforcés afin d’assurer que l’argent circule de manière appropriée en faveur des activités réussies de réduction des émissions. Cela implique de décider comment l’argent est mobilisé et puis ensuite affecté et décaissé.

Des mécanismes non-basés sur le marché pour réduire les émissions

Actuellement, de nombreux projets REDD + sont financés par des mécanismes hors marché tels que l’aide publique au développement (APD) et des dépenses intérieures des pays. L’APD et les budgets nationaux sont généralement liés à des objectifs de développement qui peuvent affaiblir l’objectif de la REDD + axé sur la réduction des émissions. Les gouvernements devraient-ils alors donner de l’argent à un organisme international, tel que la CCNUCC, qui serait utilisé spécifiquement pour atténuer les impacts du changement climatique et viendrait s’ajouter à l’APD ? Si oui, comment ces fonds seraient-ils régis et déboursés ?

Facteurs de déforestation

Les structures d’incitation pour lutter contre un facteur de déforestation peuvent différer de ceux d’un autre facteur. Les mesures incitatives pour lutter, par exemple, contre l’urbanisation (un facteur de déforestation) seraient différentes des incitations pour l’arrêt de l’expansion agricole (un autre facteur de déforestation). Les négociateurs doivent élaborer un mécanisme au niveau international qui puisse être efficace dans la lutte contre les différents facteurs de déforestation et de dégradation des forêts.

Encourager les bénéfices sans carbone

La REDD+ est généralement considérée comme faisant partie d’une solution à l’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, mais les programmes de conservation des forêts tels que la REDD + devraient générer d’autres bénéfices, s’ils sont censés être durable. Cela implique de prendre en compte comment la REDD+ peut augmenter les revenus des populations marginales tributaires des forêts et préserver voire augmenter la biodiversité dans les forêts, tout en assurant une réduction des émissions.

Pour plus d’informations sur les questions discutées dans cet article, veuillez contacter Louis Verchot.

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