S’attaquer au changement climatique pourrait réduire le risque de conflit en République centrafricaine

Renforcer la capacité de la République centrafricaine à s'adapter au changement climatique pourrait aider à construire la paix dans ce pays enclavé.
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Mengembangkan kemampuan beradaptasi terhadap perubahan iklim dapat menjadi bagian strategis dari proses rekonstruksi dan rekonsiliasi seraya memainkan peran sentral dalam pemenuhan target pembangunan, menurut penelitian oleh para ilmuwan CIFOR. Kredit foto: hdptcar

Développer la capacité d’adaptation au changement climatique peut être un élément stratégique du processus de reconstruction et de réconciliation, tout en jouant un rôle central pour atteindre des objectifs de développement, selon une étude menée par des chercheurs du CIFOR. Photo: hdptcar

Bogor, Indonésie (22 août 2013) – Renforcer la capacité de la République centrafricaine à s’adapter au changement climatique pourrait aider à construire la paix dans ce pays enclavé, suggèrent les chercheurs. Le pays a été handicapé par l’instabilité politique et la guerre civile depuis son indépendance de la France en 1960.

Des estimations prévisionnelles indiquent que les températures en République centrafricaine pourraient augmenter de 1,5 à 2,75 degrés Celsius (2,7 à 4,95 degrés Fahrenheit) d’ici 2080, selon un rapport publié dans la revue Climate and Development* par des scientifiques travaillant avec le Centre de Recherche Forestière Internationale (CIFOR).

Entre 1978 et 2009, les températures ont augmenté dans ce pays d’Afrique sub-saharienne d’en moyenne 0,3 °C par décennie, tandis que les précipitations ont diminué d’environ 1,9 cm (trois quarts de pouce) en moyenne par an de 1978 à 2009, selon les statistiques de la Banque mondiale.

Le processus de développement de la capacité d’adaptation au changement climatique peut être un élément stratégique du processus de reconstruction et de réconciliation, tout en jouant un rôle central pour atteindre des objectifs de développement, indique l’article.

«En renforçant les capacités d’adaptation, on prend vraiment en charge certains des enjeux de développement et en rassemblant les personnes dans un processus sincèrement participatif, on peut réellement contribuer à la réduction des conflits et des tensions au sein du pays», a déclaré Denis Sonwa, chercheur et agro-écologiste au CIFOR.

LE DÉVELOPPMENT AU MILIEU DE LA CRISE

Carte de la végétation en Afrique centrale, dérivée de l’imagerie satellitaire Spot-Vegetation

La nouvelle recherche* a été menée en République centrafricaine, dont l’ONU dit qu’elle serait sur le point de devenir un État défaillant* vu qu’elle est se débat avec une crise humanitaire causée par le conflit civil récent. C’est l’un des pays les plus pauvres au monde*, selon l’Indice de développement humain des Nations Unies.

L’étude sur «Les perceptions institutionnelles, la capacité d’adaptation et la réponse au changement climatique dans un pays post-conflit: une étude de cas en République centrafricaine*», souligne les façons dont le changement climatique affecte la nation de 4,6 millions personnes – en particulier les pauvres des zones rurales qui forment la majorité de la population – et identifie les obstacles à l’action.

Le terrain de la République centrafricaine est couvert par un mélange varié de plaines ayant une végétation dense et à feuilles persistantes qui va de la forêt du bassin du Congo dans le Sud, aux forêts en mosaïque d’arbres et d’arbustes dans le Nord.

Des entretiens de recherche ont été menés en décembre 2009 avec les décideurs du gouvernement, des organisations non gouvernementales (ONG) et d’autres institutions clés en République centrafricaine impliquées dans le changement climatique, le développement, la conservation et les enjeux forestiers. Ces entretiens ont révélé une forte prise de conscience des impacts du changement climatique, notamment les changements de la saison des pluies, menant à des périodes plus sèches, explique Carolyn Peach Brown, l’auteur principal et professeur à l’Université Prince Edward Island* à Charlottetown, la capitale provinciale de la province canadienne de l’Île-du-Prince-Édouard.

Toutefois, les mesures concrètes pour s’adapter – ou pour participer à des programmes visant à atténuer – au changement climatique se sont avérées être seulement dans un stade précoce, dit-elle.

«Un obstacle majeur à la réponse au changement climatique en République centrafricaine est le conflit et l’insécurité permanente qui entravent tout effort de réduction de la pauvreté ou de développement, y compris les efforts d’adaptation au changement climatique», a ajouté Mme Peach Brown.

Lorsque des personnes sont déplacées en tant que réfugiés, qu’elles deviennent incapables de cultiver des plantes, d’obtenir de l’eau, de vendre leurs biens ou de subvenir aux besoins de leurs familles par d’autres moyens, cela ne peut qu’avoir un effet négatif sur la population.

Les effets du changement climatique rendront la vie quotidienne encore plus difficile dans les situations de conflit, dit-elle. Le conflit a détruit l’infrastructure qui a contribué au développement de l’agriculture dans les zones rurales de la République centrafricaine, ce qui aurait pu contribuer à améliorer l’adaptation au changement climatique, poursuit-elle.

«Le niveau élevé de fluctuation du personnel institutionnel dans les zones touchées par le conflit affaiblit également la capacité des institutions à être réactives», ajoute Mme Peach Brown. Selon elle, la mauvaise gouvernance, la mauvaise coordination entre les secteurs, l’engagement insuffisant avec les communautés locales et les ressources inadéquates pour l’éducation, pour la recherche et pour les infrastructures, limitent également la capacité de lutter contre le changement climatique.

Selon M. Sonwa, co-auteur de l’article, le partage des connaissances et des ressources entre les parties prenantes est essentiel pour mieux comprendre les besoins des communautés locales et renforcer la capacité du pays à répondre aux menaces climatiques.

La disponibilité en eau et l’agriculture sont deux axes clés de la vulnérabilité de la République centrafricaine, selon la recherche. Il existe deux extrêmes quand il s’agit de l’eau – des périodes sèches plus longues et une prévalence accrue des inondations, dit M. Sonwa.

«Le secteur agricole est encore artisanal – ils ne disposent pas de systèmes d’irrigation – l’agriculture est donc vraiment vulnérable parce qu’elle dépend de la saison des pluies», dit-elle, se référant aux limites des méthodes agricoles traditionnelles et à faible intensité.

«Et puis il y a ce contexte de conflits, qui renforce cette vulnérabilité. Les conflits détruisent le réseau qui existe au sein d’une communauté ainsi que l’infrastructure.»

Les conflits se traduisent également par des saisons de plantation manquées, une situation difficile pour les populations rurales, dit-il. Il cite deux activités principales qui ont été utiles pour amener les personnes à travailler ensemble : le Programme d’Action National d’Adaptation (PANA*) et l’initiative de la REDD+ (Réduction des Émissions issues de la Déforestation et de la Dégradation des forêts).

IDENTIFIER LES SOLUTIONS

Le PANA fournit un processus pour les pays les moins développés afin d’identifier les activités prioritaires qui répondent à leurs besoins urgents et immédiats d’adaptation au changement climatique.

La REDD+ est un mécanisme soutenu par l’ONU pour réduire les émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts en offrant aux gestionnaires de terres des incitations conditionnelles pour préserver les forêts.

Les deux programmes ont été reconnus comme des éléments essentiels au développement des relations entre les institutions. Les chercheurs ont conclu que ces liens doivent être renforcés pour développer la capacité à atténuer le changement climatique et adapter l’agriculture et la gestion des ressources naturelles aux tendances à long terme de la variabilité du climat.

Pourtant, de nombreuses organisations internationales se sont retirées de République centrafricaine en raison de l’instabilité, ce qui signifie que la population ne bénéficie d’aucun de ces programmes, dit Mme Peach Brown.

«Le travail que les institutions locales faisaient ne sera pas non plus réalisé en raison de l’insécurité. Mais étant donné les réalités du changement climatique pour les populations locales, elles vont quand même devoir faire face et s’adapter à ses effets dans leur vie quotidienne, même si elles sont dans l’insécurité due au conflit armé», constate-t-elle.

La recherche résume des actions positives effectuées par des ONG en République centrafricaine avant la dernière flambée de violence, comme des travaux pour développer l’agriculture intensive dans la savane et les zones en jachère pour réduire la dépendance à l’agriculture itinérante sur brûlis, ainsi que des projets d’agroforesterie et de reboisement.

«On doit rendre le secteur agricole plus résilient – ainsi, on aide réellement à rétablir la sécurité alimentaire du pays», dit M. Sonwa.

La recherche indique que les ONG environnementales, qui ont été engagées auprès de groupes autochtones sur des projets de cartographie des forêts, devraient permettre d’améliorer la gestion des forêts face au changement climatique et la REDD+. De plus, les universités ont étudié la sensibilité de la flore et de la faune vis-à-vis des changements – un facteur important pour les communautés locales qui utilisent les forêts comme source de nourriture.

Et après le conflit ? Toute aide étrangère continue devra reconnaître la vulnérabilité accrue des populations locales en raison du changement climatique ainsi que du conflit armé, affirme Mme Peach Brown.

«Après la guerre civile, le renforcement des capacités d’adaptation au changement climatique, qui favorise les liens entre les diverses institutions, pourrait également contribuer au processus de reconstruction, de réconciliation et de consolidation de la paix dans un pays», dit-elle.

M. Sonwa approuve. «Il serait difficile de dire que vous faites une bonne reconstruction post-conflit sans tenir compte du climat», dit-il.

Pour plus d’informations sur les sujets abordés dans cet article, veuillez contacter Denis Sonwa à d.sonwa@cgiar.org.

Ce travail s’inscrit dans le cadre du Programme de recherche du CGIAR sur les forêts, les arbres et l’agroforesterie et a été réalisé par le projetForêts du Bassin du Congo et Adaptation au Changement Climatique (CoFCCA) du CIFOR. Il a été soutenu par le programme Adaptation au changement climatique en Afrique, le Centre de Recherche pour le Développement International et le Département Britannique pour le Développement International (DFID) — et un Conseil de Recherches en Sciences Humaines de la Bourse Postdoctorale du Canada. En supplément, il a été soutenu par l’Université de Guelph.

*Liens non traduits en français

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